Des scientifiques chinois impliqués dans la recherche de nouvelles technologies de conception de micropuces ont récemment publié une partie des résultats de leurs travaux sur le site Web de l’IEEE Electron Device Letters. Ils ont déclaré avoir réussi à mettre au point un transistor qui augmentera la performance des puces de façon exponentielle et qui réduira considérablement leur consommation d’énergie : une lueur d’espoir pour la loi de Moore qui semble mise à mal depuis plusieurs années ;?
Les puces informatiques les plus perfectionnées qu’on trouve actuellement sur le marché exploitent le procédé de gravure en 7 nanomètres (nm), ce qui signifie qu’elles sont constituées de transistors de sept nm. Le professeur Yin Huaxiang, responsable des travaux, a déclaré que son équipe avait mis au point des transistors de 3 nm – à peu près la taille d’un brin d’ADN humain - et que des dizaines de milliards d’entre eux pouvaient tenir sur une puce de la taille d’un ongle.
La miniaturisation accrue des transistors permet de concevoir des puces qui en contiennent toujours plus. D’après Yin qui est également directeur adjoint du département et des technologies intégrées et des dispositifs microélectroniques à l’Institut de microélectronique de l’Académie chinoise des sciences à Beijing, ce procédé permet d’augmenter les performances d’une puce de façon exponentielle tout en réduisant sa consommation d’énergie.
Mais même si les progrès réalisés dans le domaine de la miniaturisation des transistors MOSFET ont d’une certaine manière permis de confirmer la pertinence de la loi de Moore, l’un des obstacles à ce procédé réside dans une propriété fondamentale, la distribution de Boltzmann des électrons encore appelée tyrannie de Boltzmann qui fixe à 60 mV/décade la limite thermo-ionique minimale théorique d’une caractéristique de pente sous le seuil (SS) d’un transistor. Cette propriété fondamentale suggère qu’il n’est pas possible de réduire indéfiniment la tension de fonctionnement pour diminuer la consommation d’énergie et donc que l’augmentation du nombre de transistors dans une puce électronique expose à un risque plus élevé de surchauffe.
L’équipe de Yin a reconnu qu’elle a dû faire face à ces problèmes. S’agissant par exemple de la tyrannie de Boltzmann, elle a confié avoir utilisant une méthode connue sous le nom de capacité négative afin de concevoir des transistors à effet de champ à capacité négative (transistor NC-FET) qu’on peut alimenter en utilisant la moitié de la quantité minimum théorique d’électricité requise.
Le début de la commercialisation de ce procédé de gravure en 3 nm « ;made in China ;» pourrait prendre quelques années, car l’équipe travaillerait encore sur le contrôle des matériaux et de la qualité. Mais Yin reste optimiste : « ;C’est la partie la plus excitante de notre travail. Ce n’est pas simplement une nouvelle découverte dans un laboratoire. Il a un potentiel élevé d’applications réelles et sérieuses ;» et « ;nous avons le brevet ;».
Les chercheurs chinois impliqués dans ce projet sont de toute évidence persuadés que leur percée dans le domaine du design des transistors et des puces propulsera la Chine dans une nouvelle ère qui permettra à Pékin de rattraper son retard sur les acteurs incontournables du moment, notamment la Corée du Sud avec Samsung, Taïwan avec TSMC ou encore les USA avec Intel et IBM. À ce propos, Yin a déclaré : « ;auparavant, nous [la Chine] regardions les autres se battre. Maintenant, nous rivalisons avec eux ;». Mais n’est-il pas naïf de penser que le fossé technologique qui existe actuellement entre la Chine et ses concurrents pourrait être comblé du jour au lendemain par une seule percée ;technologique ?
À Beijing, un professeur de l’Université Tsinghua qui a étudié la future technologie mise au point par l’équipe du professeur Yin semble plutôt de cet avis. Comparé au procédé de gravure en 7 nm, le géant Samsung a, par exemple, déclaré qu’un processeur construit avec ses transistors de 3 nm consommerait deux fois moins d’énergie pour atteindre une performance supérieure de 35 pour cent. Il serait intéressant de comparer les données de performances annoncées par les grands fondeurs de cette industrie à celles du procédé de gravure en 3 nm développé par l’équipe de Yin pour se faire une meilleure idée de la maturité de la technologie chinoise. Toutefois, il est certain que le développement rapide de ce type de technologie permettrait à la Chine de mieux résister aux pressions de pays concurrents comme c’est le cas actuellement dans les relations commerciales Chine - États-Unis.
Source : SCMP (South China Morning Post)
Et vous ?
Que pensez-vous de cette percée technologique chinoise ?
Cette percée marque-t-elle le début d’une nouvelle ère pour l’industrie des semiconducteurs « made in China » ? Suffira-t-elle pour que la Chine refasse son retard sur ses concurrents ?
La multiplication de ce type d’initiative dans la sphère technologique pourrait-elle permettre à la Chine de mieux résister aux pression étrangères, notamment américaines, en cas de conflit commercial ?
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Le , par Christian Olivier
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