La demande en énergie continuera à grimper si aucune mesure n'est prise
Même si la plupart des grandes entreprises informatiques (Google, Apple, Amazon, Facebook, etc.) annoncent être en train de passer aux énergies vertes et qu'elles pourraient utiliser rien que cette forme d'énergie pour alimenter 100 % de leurs activités mondiales d'ici les vingt prochaines années, la consommation d'énergie des centres de données ne baisse pas pour autant. Dans un rapport d'étude publié en novembre dernier, la Commission européenne estime que, rien que dans l'union, la consommation d'électricité des centres de données pourrait atteindre jusqu'à 98,5 TWh d'ici 2030.
En octobre 2020, un rapport sur l’état de l’électricité en Suède a fait état de ce que, dans le pays, Amazon, Google et Facebook utilisent, à eux seuls, l'équivalent de la moitié de l'énergie produite par une centrale nucléaire. Si les centres de données de ces géants de l'Internet continuent à consommer autant d'énergie, le pays pourrait faire face à de graves pénuries d'électricité très prochainement. L’efficacité énergétique du cloud computing est l'une des principales priorités de l'Union européenne. En conséquence, sa stratégie numérique vise à créer des centres de données climatiquement neutres, hautement économes en énergie et durables d'ici 2030 au plus tard.
Dans le monde en général, des études montrent que les ordinateurs consomment aujourd'hui une quantité d'énergie stupéfiante et selon une récente estimation, les centres de données consomment à eux seuls 2 % de l'électricité mondiale, un chiffre qui devrait atteindre 8 % d'ici la fin de la décennie. Afin de contrer cette hausse de la demande en énergie des centres de données, les scientifiques pensent que le microprocesseur, qui est au centre de l'univers informatique, s'avère être un élément important sur lequel l'on peut agir. Selon eux, le microprocesseur pourrait peut-être être rationalisé de manière entièrement nouvelle.
Des chercheurs japonais se sont penchés sur cette approche lors d'une récente étude et semblent avoir obtenu des résultats probants. Ils ont mis au point un microprocesseur supraconducteur ou un microprocesseur à résistance électrique nulle qui, selon eux, est le premier dispositif du genre. En effet, les microprocesseurs supraconducteurs pourraient offrir une solution potentielle pour une puissance de calcul plus efficace sur le plan énergétique, mais à l'heure actuelle, ces conceptions nécessitent des températures ultra-froides inférieures à 10 kelvins (ou -263 degrés Celsius).
Le groupe de recherche japonais a cherché à créer un microprocesseur supraconducteur adiabatique, ce qui signifie qu'en principe, l'énergie n'est ni gagnée ni perdue par le système pendant le processus de calcul.
Le microprocesseur MANA (Monolithic Adiabatic iNtegration Architecture)
Selon les chercheurs, les microprocesseurs semiconducteurs adiabatiques existent, mais le nouveau prototype de microprocesseur, appelé MANA (Monolithic Adiabatic iNtegration Architecture), est le premier microprocesseur supraconducteur adiabatique au monde. Il est composé de niobium supraconducteur et repose sur des composants matériels appelés AQFP (adiabatic quantum-flux-parametrons). Chaque AQFP est composé de quelques interrupteurs à jonction Josephson à action rapide, qui nécessitent très peu d'énergie pour supporter l'électronique supraconductrice.
En outre, le microprocesseur MANA comprend plus de 20 000 jonctions Josephson (soit plus de 10 000 AQFP) au total. « Les AQFP utilisés pour créer le microprocesseur ont été optimisés pour fonctionner de manière adiabatique de sorte que l'énergie tirée de l'alimentation électrique puisse être récupérée sous des fréquences d'horloge relativement basses jusqu'à environ 10 GHz », a expliqué Christopher Ayala, professeur associé à l'Institut des sciences avancées de l'Université nationale de Yokohama, au Japon, qui a contribué au développement du nouveau microprocesseur.
« C'est peu par rapport aux centaines de gigahertz que l'on trouve généralement dans l'électronique supraconductrice conventionnelle », a-t-il ajouté. Toutefois, cela ne signifie pas pour autant que le dispositif du groupe atteigne des vitesses de 10 GHz. « Nous montrons également sur une puce séparée que la partie traitement des données du microprocesseur peut fonctionner jusqu'à une fréquence d'horloge de 2,5 GHz, ce qui est comparable aux technologies informatiques actuelles », a déclaré le professeur Ayala lors d'un communiqué de presse.
« Nous nous attendons même à ce que cette fréquence passe à 5-10 GHz à mesure que nous améliorons notre méthodologie de conception et notre dispositif expérimental ». Le prix d'entrée pour le microprocesseur à base de niobium est bien sûr la cryogénie et le coût énergétique pour refroidir le système à des températures supraconductrices. « Mais même en tenant compte de ces frais généraux de refroidissement, l'AQFP est toujours environ 80 fois plus économe en énergie que les dispositifs électroniques à semiconducteurs de pointe, [tels que] le FinFET de 7 nm, disponible aujourd'hui », a déclaré Ayala.
Enfin, comme le microprocesseur MANA nécessite des températures au niveau de l'hélium liquide, il est mieux adapté aux infrastructures informatiques à grande échelle comme les centres de données et les supercalculateurs, où des systèmes de refroidissement cryogéniques pourraient être utilisés. « La plupart de ces obstacles, à savoir l'efficacité de la zone et l'amélioration des réseaux de latence et d'horloge de puissance, sont des domaines de recherche que nous avons beaucoup étudiés, et nous avons déjà des orientations prometteuses à suivre », a conclu le professeur.
Source : Rapport de l'étude
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