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Toutefois, la réutilisation des serveurs ne fait pas l’unanimité. Certains considèrent que l’exploitation d’anciens équipements est peu viable, notamment en raison de leur consommation énergétique, du bruit et des besoins en refroidissement. D’autres y voient un défi technologique intéressant ou une opportunité éducative.
Les principaux fournisseurs de cloud se sont engagés à réduire leurs émissions de carbone d’ici 2030, un objectif qui nécessite des solutions efficaces et rapidement déployables. Parmi les approches envisagées, la conception d’SKU de serveurs informatiques à faible empreinte carbone, appelés GreenSKU, apparaît comme une voie prometteuse, les serveurs étant responsables d’une part significative des émissions liées au cloud. Cependant, l’adoption des GreenSKU soulève plusieurs défis techniques et opérationnels.
Pour répondre à ces enjeux, une méthodologie systématique et un cadre associé, le GSF (GreenSKU Framework), ont été développés afin d’aider les fournisseurs de cloud à optimiser la conception et le déploiement des GreenSKU. Ce cadre permet d’évaluer les performances globales des serveurs GreenSKU et leur impact carbone, tout en équilibrant les compromis entre réduction des émissions et exigences de performance des applications. Testé dans un environnement de production d’un grand fournisseur de services cloud, le GSF fournit une analyse rigoureuse justifiant l’intégration des GreenSKU dans les infrastructures cloud.!
L’application du GSF à un nouveau modèle de GreenSKU a permis de démontrer une réduction des émissions de carbone de 29 % par cœur client par rapport aux serveurs actuellement en service. Un déploiement optimisé, prenant en compte les besoins des applications, permet de réduire les émissions de 16 %, tandis qu’en intégrant les coûts opérationnels des centres de données, l’impact carbone du cloud diminue de 9 %.
À grande échelle, l’efficacité énergétique reste un critère clé, et les centres de données privilégient le calcul par watt, rendant le matériel vieillissant moins compétitif. Ainsi, si l’approche de Microsoft apporte une solution innovante, elle doit composer avec des compromis techniques et des limites inhérentes à l’usage de composants recyclés.
Dans la lutte contre le changement climatique, la réduction des émissions de carbone est une priorité mondiale. Bien que les industries les plus visibles, telles que les transports et l'industrie manufacturière, soient généralement les plus importantes, les technologies de l'information et de la communication (TIC) jouent également un rôle significatif. Actuellement, ce secteur est responsable de 2 à 4 % des émissions mondiales de carbone, un chiffre similaire à celui de l'industrie aéronautique, et cette proportion devrait passer à 20 % d'ici 2030. Les services de cloud computing, un élément clé des TIC, génèrent deux types d'émissions : les émissions opérationnelles, qui proviennent de la consommation d'énergie, et les émissions dites « incorporées », dérivées de la fabrication de composants matériels, tels que les semi-conducteurs.
Réduire l'empreinte carbone des centres de données
L'équipe de chercheurs de l'université Carnegie Mellon dirigée par Jaylen Wang, a développé une approche appelée « GreenSKUs » pour concevoir des serveurs plus économes en carbone, tout en maintenant des performances optimales. Cette initiative vise à réduire les émissions des centres de données, un domaine clé dans le secteur des technologies de l'information et de la communication (TIC), qui génèrent des émissions à la fois opérationnelles, liées à la consommation d’énergie, et « incorporées », résultant de la fabrication des composants matériels, tels que les semi-conducteurs. Face à ce défi, des géants technologiques comme Microsoft et Google ont fixé des objectifs ambitieux de réduction de leur empreinte carbone, en ciblant notamment leurs centres de données.
La recherche menée par l’équipe de Carnegie Mellon, sous la direction de Wang, a été présentée lors du symposium international ACM/IEEE 2024 sur l'architecture des ordinateurs. Elle propose une méthode structurée pour optimiser la conception et la mise en œuvre de serveurs plus verts. Selon Wang, « l’utilisation des ressources informatiques est directement liée aux émissions de carbone », et il précise que les applications nécessitant de grandes capacités de traitement et de stockage génèrent proportionnellement plus d'émissions de CO2.
Pour aider les fournisseurs de services cloud à concevoir des serveurs plus efficaces, l’équipe a développé le cadre méthodologique GSF. Ce système permet de prendre des décisions plus éclairées concernant la conception et le déploiement de serveurs, tout en minimisant les émissions de carbone. Lors d’un test dans un environnement de production sur la plateforme Microsoft Azure, l'utilisation du GSF a permis de réduire les émissions de carbone de près de 10 %, ce qui pourrait se traduire par une réduction mondiale des émissions de carbone de 0,1 à 0,2 % d'ici 2030.
L'équipe de recherche, dirigée par Wang et comprenant la professeure adjointe Akshitha Sriraman, prévoit d'étendre ses travaux à d'autres domaines du cloud computing. Wang a également souligné que la croissance de l'intelligence artificielle et des modèles linguistiques, comme ChatGPT, entraînera la nécessité de concevoir des serveurs spécialisés, capables de maximiser l'efficacité tout en réduisant les émissions. Il a mis l'accent sur l'importance de lutter contre l'obsolescence programmée en réutilisant les composants déclassés dans les nouvelles conceptions de serveurs.
Avec cette approche innovante, les chercheurs ambitionnent de transformer l'avenir des centres de données et du cloud computing. Non seulement en optimisant les performances des serveurs, mais aussi en réduisant leur impact environnemental, cette recherche a pour objectif de rendre le secteur technologique plus durable tout en répondant aux défis croissants de la consommation énergétique et des émissions de carbone.
Cloud durable : la réutilisation des serveurs est-elle vraiment la réponse ?
L’initiative GreenSKU de Microsoft s’inscrit dans une démarche louable de réduction de l’empreinte carbone, en maximisant la durée de vie des composants critiques. L’approche logicielle, qui permet d’optimiser l’utilisation des ressources existantes, est particulièrement pertinente dans un contexte où la production de nouveaux équipements entraîne des émissions significatives. Toutefois, cette solution semble plus adaptée aux composants spécifiques, comme la mémoire et les SSD, plutôt qu’à une réutilisation massive des serveurs entiers, dont l’efficacité énergétique diminue avec le temps.
L’un des principaux défis réside dans la consommation énergétique des anciens équipements. À l’échelle d’un centre de données, les gains écologiques obtenus en prolongeant la durée de vie des serveurs risquent d’être annulés par leur inefficacité énergétique. La chaleur dégagée par ces machines, le bruit généré et les besoins en refroidissement supplémentaire augmentent également les coûts d’exploitation. Ce paradoxe soulève une question essentielle : est-il vraiment plus écologique d’optimiser l’usage d’un matériel vieillissant plutôt que d’investir dans des infrastructures plus modernes et plus efficientes dès le départ ?
D’un autre côté, la réutilisation ciblée de composants peut être une opportunité éducative et technologique intéressante. Pour les établissements académiques et les laboratoires de recherche, disposer d’équipements encore fonctionnels, même s’ils ne sont pas les plus performants, permettrait d’expérimenter des optimisations logicielles et d’améliorer la formation des ingénieurs. Cependant, cette approche demande des investissements en espace, en maintenance et en refroidissement, ce qui peut limiter son adoption à grande échelle.
Enfin, une alternative plus pragmatique consisterait à coupler cette initiative à des solutions de chauffage récupératif, comme cela se fait déjà dans certaines entreprises. Récupérer la chaleur des serveurs réutilisés pour alimenter des bâtiments en énergie thermique pourrait compenser leur inefficacité énergétique. Mais pour que cette approche soit viable, elle nécessite une refonte des infrastructures, ce qui soulève des contraintes économiques et techniques non négligeables. L’efficacité d’une telle démarche dépendra donc de la capacité de Microsoft à concilier innovation logicielle et rentabilité environnementale réelle.
Sources : Microsoft, Foundation for Enterprise and Climate
Et vous ?
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