
Intel a officiellement annoncé vendredi avoir conclu un accord avec l'administration du président Donald Trump, après que ce dernier ait déclaré que le gouvernement allait prendre une participation de 10 % dans le fabricant de puces en difficulté.
Alors qu'Intel affirme que le gouvernement réalise un « investissement de 8,9 milliards de dollars dans des actions ordinaires Intel », l'administration ne semble pas engager de nouveaux fonds. Il s'agit plutôt de honorer ce qu'Intel a décrit comme « des subventions précédemment accordées, mais non encore versées, à Intel ». Plus précisément, les 8,9 milliards de dollars proviendraient de 5,7 milliards de dollars accordés mais non versés à Intel dans le cadre du CHIPS Act de l'administration Biden, ainsi que de 3,2 milliards de dollars également accordés par l'administration Biden dans le cadre du programme Secure Enclave.
La participation du gouvernement reste passive : pas de droits de vote, pas de siège au conseil d’administration. L’État n’a donc pas la main sur les choix stratégiques de l’entreprise, mais il devient un actionnaire de référence. À cela s’ajoute un mécanisme incitatif : un warrant valable cinq ans qui permettrait à l’État d’augmenter sa participation jusqu’à 5 % supplémentaires si Intel perdait le contrôle majoritaire de son activité de foundry. Une manière de garantir que l’entreprise reste un acteur américain central dans la production de puces stratégiques.

Du côté de l’administration américaine, l’opération est présentée comme une « excellente affaire pour l’Amérique et pour Intel ». Dans un message publié sur son réseau social Truth Social, Trump a écrit : « Les États-Unis n'ont rien payé pour ces actions ».
Ce geste marque une rupture avec la tradition américaine du « laisser-faire » : en dehors des crises financières, les États-Unis évitent habituellement d’entrer au capital d’entreprises privées. Ici, le message est clair : les semi-conducteurs sont considérés comme un actif stratégique, au même titre que l’énergie ou la défense.
L’objectif est double :
- assurer la souveraineté industrielle, en garantissant que la production de puces critiques reste sur le sol américain ;
- envoyer un signal géopolitique fort, notamment vis-à-vis de la Chine, en montrant que Washington n’hésite pas à utiliser les outils de l’État pour défendre ses champions technologiques.
Trump a critiqué la loi CHIPS, la qualifiant « d'horrible, horrible chose » et appelant le président de la Chambre des représentants Mike Johnson à « s'en débarrasser ». Dans un document réglementaire déposé en juin, Intel a déclaré que, bien qu'elle ait déjà reçu 2,2 milliards de dollars au titre de la loi CHIPS, elle avait par la suite demandé un remboursement supplémentaire de 850 millions de dollars que le gouvernement n'avait pas encore versé.
Selon le New York Times, certains banquiers et avocats estiment que la loi CHIPS pourrait ne pas permettre au gouvernement de convertir ses subventions en capitaux propres, ce qui exposerait cet accord à d'éventuelles contestations judiciaires.
En plus de s'en prendre à la loi CHIPS, Trump a également accusé au début du mois le PDG d'Intel, Lip-Bu Tan, de conflits d'intérêts et a déclaré qu'il devrait « démissionner immédiatement ». Le président s'est montré plus positif à l'égard de Tan vendredi, déclarant sur Truth Social qu'il avait « négocié cet accord avec Lip-Bu Tan, le très respecté PDG de la société ».
Pour sa part, le PDG d'Intel a répondu : « En tant que seule entreprise de semi-conducteurs à mener des activités de recherche et développement et de fabrication de pointe dans le domaine de la logique aux États-Unis, Intel s'engage fermement à garantir que les technologies les plus avancées au monde soient fabriquées aux États-Unis ». Et de continuer en disant : « L'accent mis par le président Trump sur la fabrication de puces aux États-Unis stimule des investissements historiques dans un secteur vital qui fait partie intégrante de la sécurité économique et nationale du pays. Nous sommes reconnaissants de la confiance que le président et l'administration accordent à Intel, et nous sommes impatients de travailler à faire progresser le leadership technologique et industriel des États-Unis. »
Des perspectives encore incertaines
Reste à savoir si ce soutien suffira à redresser la trajectoire d’Intel. Plusieurs défis demeurent :
Tout d'abord, parlons de la fiabilité industrielle : les procédés de gravure avancés développés par Intel souffrent encore de problèmes de rendement. Sans amélioration rapide, l’entreprise aura du mal à attirer des clients externes sur son activité foundry. Évoquons également la pression commerciale : la Chine pourrait réagir en réorientant ses achats vers d’autres fournisseurs, fragilisant encore davantage les parts de marché internationales d’Intel.
De plus, le maintien de la direction actuelle reste sous surveillance. Les tensions entre le président américain et le PDG d’Intel ont déjà alimenté les rumeurs de déstabilisation. La moindre crise interne pourrait prendre une ampleur politique inédite. Sans compter le fait que certains juristes estiment que la conversion de subventions en capital...
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